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Petit Dictionnaire classique d'histoire naturelle

Les frontières entre enseignements scientifique et littéraire sont souvent malaisées à établir dans la première partie du XIXe siècle, notamment parce que, faute de cours dédiés aux sciences physiques et naturelles, l'introduction à ces matières prend souvent pour support l'examen de textes d'écrivains. Comme l'explique Pierre Kahn, en dehors des mathématiques, les sciences “entrent à l’école primaire non par les programmes (qui, pour les matières facultatives, n’existent pas) et les manuels qui, naturellement, les accompagnent, mais par les bibliothèques scolaires1”. C'est dans ce contexte qu'il faut aborder le Petit Dictionnaire classique d'histoire naturelle, ou Morceaux choisis sur nos connaissances acquises dans les trois règnes de la nature, publié en 1827, sans nom d'auteur, par “une société de naturalistes et de gens de lettres”. Bien qu'il ne s'agisse en réalité que d'une anthologie de textes puisés dans une sorte de canon savant et lettré où Chateaubriand voisine avec Linné, un tel ouvrage pouvait être perçu comme un outil adéquat pour initier aux sciences. Un bref avertissement l'explique : ce florilège entend offrir le meilleur moyen de familiariser de jeunes lecteurs à ces disciplines, tout en cultivant leur goût.

L'idée qui a présidé à la réunion des articles qui composent ce petit Dictionnaire est le désir de mettre sous les yeux de la jeunesse les principales notions de l'histoire naturelle, dans une suite de tableaux tracés par des écrivains classiques, et de donner des leçons de littérature et de morale, tout en fixant dans l'esprit ce que présentent de plus remarquable nos connaissances acquises dans l'histoire des trois règnes.
Nous pensons aussi qu'on apprend mal dans de mauvais livres. Tous ces recueils négligés, où des mains incapables ont défiguré l'histoire naturelle, sous prétexte d'abréger l'étude aux enfans, ne sont faits que pour dégoûter de la lecture et des sciences les plus séduisantes. C'est le reproche qu'on peut généralement faire à la plupart de nos ouvrages d'éducation.
Ici, du moins, on ne trouvera que des morceaux clignes d'occuper l'esprit et de se fixer dans la mémoire, et les jeunes gens aimeront à apprendre ce que les lecteurs plus âgés se plairont toujours à relire2.

Ce propos se termine par un éloge du potentiel de séduction propre aux “jolies figures qui sont jointes à cet ouvrage”, à titre “plutôt d'Ornement que de Développement3”. La page de titre, qui propose d'emblée une de ces représentations, annonce aussi la place que Delille recevra au sein du volume, puisque le nom du poète figure en bonne place dans la liste des auteurs mis en avant :

Les textes ne font l'objet d'aucune note ou introduction, et leur source n'est identifiée que par le nom de leur auteur. Seul l'ordre alphabétique adopté (on débute avec “Abeilles”, puis “Aigle”, etc.) rattache donc le livre à un dictionnaire.

Dans le seul premier volume, plus de douze textes sont signés de Delille4, qui est notamment mis à contribution pour un article intitulé “Herborisation5”, uniquement formé d'un extrait du chant 3 de L'Homme des champs. Nous ne le reproduisons donc pas.

Vers concernés : chant 3, vers 410-464.

Accès à la numérisation du texte : Gallica.


Auteur de la page — Hugues Marchal 2019/04/27 21:51


1 Pierre Kahn, La Leçon de choses. Naissance de l’enseignement des sciences à l’école primaire, Lille, Presses universitaires du Septentrion, 2002, p. 72.
2 Petit Dictionnaire classique d'histoire naturelle, ou Morceaux choisis sur nos connaissances acquises dans les trois règnes de la nature […]. Mis en ordre par une société de naturalistes et de gens de lettres. Avec trente planches […], Paris, À la Librairie universelle de Mongie aîné, 1827, t. I, p. i-ii.
3 Id., p. ii.
4 Les Trois Règnes fournissent le deuxième extrait proposé dans le premier tome, donné p. 3, dans l'article “Abeilles”, juste après une page de Buffon. Ce titre encore exploité p. 10, 72, 127, 129, 136 ou 183. Dans le même tome, Les Jardins sont également convoqués (p. 49 ou 172), ainsi que le chant 1 de L'Homme des champs (p. 76). Le primat des Trois règnes est encore plus visible dans le second tome, où seul ce poème de Delille, sauf erreur, est cité, aux p. 44, 66, 114 et 214.
5 Id., t. I, p. 186-187.