"Échos" (La Justice)
Présentation du texte
Cet article badin, signé du pseudonyme Quispromène et publié en première page du quotidien La Justice, le 2 avril 1894, mêle hommage à Delille et raillerie envers son style, en reprenant un lieu commun de la critique du temps : le caractère énigmatique de ses périphrases.
Citation
L'auteur de cet entrefilet prend prétexte de la “mode” des panoramas pour convoquer le souvenir du poète et procéder à une réhabilitation ironique.
A propos de panoramas.
C'est la grande mode aujourd'hui ; on en ouvre un peu partout et à ce propos on peut se demander si on ne pourrait aussi établir dans le Jardin de Plantes une série de panoramas didactiques, les trois règnes de la nature représentés au pinceau comme Delille les a chantés.
Il parle souvent par rébus, ce pauvre Delille, et la lecture de son poème révèle des trésors de gaieté dont n'ont pas idée ceux qui méprisent simplement ce poète parce qu'il a vieilli.
Le phoque, sous sa plume, devient, parce qu'il est amphibie :
L'équivoque habitant de la terre et des ondes ;
Le rhinocéros :
L'animal recouvert de son épaisse croûte ;
L'araignée, plus difficile à décrire, exige du poète deux alexandrins :
Un insecte aux longs bras, de qui les doigts agiles
Tapissent les vieux murs de leurs toiles fragiles1 ;
Le cidre :
Du pommier neustrien ainsi le jus brillant
Prodigue au moissonneur son nectar pétillant2.
Ne raillons pas trop le vieux Delille et sa verve, souvenons-nous que Jussieu s'unissait à Cuvier pour annoter respectueusement les Trois règnes de la Nature3, et qu'ils appelaient Delille le Virgile français4.
Vers concernés : chant 3, vers 523 et 532.