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Daux, Les Petits Hommes

Volumineux ouvrage sur un sujet “miniature”, Les Petits Hommes, ou Recueil d'anecdotes sur les hommes de petite stature qui se sont fait un nom par leurs vertus, leurs talens, etc. ; suivi de l'éloge de la petitesse, dans les divers objets de la création et dans les chefs-d'œuvre de l'art, date de 1822 et se déploie sur deux tomes. Dans la tradition de l'éloge paradoxal, cette “bagatelle” se présente comme l'œuvre d'un “Myrmidon” (un homme-fourmi), qui, quoique petit “en littérature et en taille”, s'est “mis dans la tête d'élever la petitesse au niveau de la grandeur1”.

Daux explique avoir voulu contrer par l'humour les railleries que lui valaient sa stature de “lilliputien”. Série d'études, lettres et dissertations diverses mais brèves, son texte déroule les actes d'une académie imaginaire, docte assemblée de “pygmées” résolus à prouver aux “Géants” qu'il existe de “petits-grands hommes” et que le minuscule a son charme.

Sans surprise, le nom de Delille revient fréquemment dans ces pages, car l'auteur de L'Homme des champs était lui-même de taille réduite : l'éloge du “plus aimable et [du] plus sensible des poètes qui ont orné la France” vient d'ailleurs clore un discours portant sur les “petits” poètes de renom2.

Bien que des renvois à L'Homme des champs et à d'autres œuvres de Delille ponctuent Les Petits Hommes3, le chant\ 3 n'est cité qu'une fois, dans un discours sur la petitesse en botanique. Le grain de sable du texte-source devient ainsi une graine – semence végétale et point de départ d'un nouveau poème possible :

Parlons aussi des grains, et prenons pour exemple de l'utilité jointe à la petitesse, le chenevis, qui est plus petit que le blé et qui n'est pas moins digne de notre admiration. Depuis sa semaille jusqu'à sa dernière métamorphose, il n'opère que des miracles. Ah qu'un nourrisson des muses pourrait dire de belles choses sur une graine si utile aux hommes ! Quand Phœbus ne sera plus sourd pour moi, quand Pégase ne sera plus rétif, je ferai un poëme sur le chenevis, et je mettrai au frontispice, ce vers de notre poète Delille :

L'histoire de ce grain est l'histoire du monde4.

Vers concerné : chant 3, vers 220.

Mais Daux procède aussitôt à un autre emprunt, cette fois non indiqué comme tel, en reprenant presque mot à mot une des notes savantes du texte :

Défiez-vous, s'écrie un Géant, défiez-vous des petites plantes, c'est plutôt dans elles que l'on trouve les poisons que dans les fruits des arbres majestueux qui s'élèvent vers le ciel. Cette objection, toute spécieuse qu'elle paraît, peut être réfutée par le plus ignorant pharmacien. Il vous dira : Les dangers sont dans les excès ; les herbes vénéneuses employées avec prudence, peuvent devenir très-utiles. La ciguë, l'aconit, la clématite, la belladonna, la stramonée, la jusquiame, la pulsatite, la colchique et beaucoup d'autres, deviennent d'excellens remèdes, quand on s'en sert avec discernement : alors ce ne sont plus des poisons5.

Note concernée : chant 3, note 19.

Accès à la numérisation du texte : Gallica.


Auteur de la page — Hugues Marchal 2017/02/10 16:35


1 Jean-André Daux, Les Petits Hommes…, Paris, Pigoreau, 1822, t. I, p. i-ii.
2 Id., t. I, p. 277-278.
3 Par exemple, pour saluer “les louanges [que Delille] a données à un grand nombre de petits animaux”, Daux reproduit les vers des Trois Règnes de la nature consacrés au nautile (id., t. II, p. 111).
4 Id., t. II, p. 125.
5 Id., t. II, p. 125-126, nous soulignons.