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Chomiński (trad.), Człowiek wieyski albo Georgiki francuzkie

Œuvre posthume de Chomiński, cette traduction polonaise1 de L'Homme des champs a été publiée à Vilnius, en 1817, soit un an seulement après celle de Feliński. Le titre Człowiek wieyski albo Georgiki francuzkie peut se traduire par “L’Homme de la campagne ou Les Géorgiques françaises” et le texte suit explicitement l’édition remaniée de 1805. Il a rencontré un certain succès, puisqu'il a été réédité en 1818 et 1819.

Le volume débute par un avertissement d’un parent du traducteur, Antoine Chomiński, suivi – comme chez Feliński – d'une dédicace en vers du traducteur au prince Czartoryski. De façon générale, ce préambule adopte un ton comparable à ceux que l'on trouve dans la première traduction : aristocrates cultivés, tous deux issus des confins orientaux de la Pologne (Ukraine occidentale ou Lituanie), hommes politiques, soldats, et passionnés de littérature française, comme tous les membres de l’élite polonaise de cette époque, Chomiński et Feliński manifestent un extrême enthousiasme pour l'œuvre de Delille.

La préface de Delille est conservée, ainsi que les notes et, pour les trois derniers chants, les arguments. Le volume est complété par quelques odes, traduites de Gresset.

Chomiński emploie lui aussi des vers de 13 syllabes, pendants polonais de l’alexandrin, à rimes suivies. Sa traduction, quoique fidèle, semble moins littérale que celle de son prédécesseur. Comme chez Feliński, il est possible de comparer vers à vers le célèbre passage de Delille sur le grain de sable (chant 3, vers 201-220) et la version qu'en propose Chomiński. Ce dernier paraît jouer davantage sur les allitérations et harmonies sonores suggérant les roulements du marbre dans l’océan :

201 Mais, sans quitter vos monts et vos vallons chéris,
Lecz stojac nad dolina, ani schodzac z gory
202 Voyez d’un marbre usé le plus mince débris :
NWpatrzcie sie w te ulomki, wszak to sa marmury :
203 Quel riche monument ! de quelle grande histoire
CWieluz to zbior pamiatek ! Zmiany i koleje
204 Ses révolutions conservent la mémoire !
W jakich sie marmur skladal, sa to swiata dzieje.
205 Composé des dépôts de l’empire animé,
Dal mu tresc zyjacego dawniey tworu szczatek,
206 Par la destruction ce marbre fut formé ;
Z cudzego on zniszczenia wzial swoy pierwszy watek.
207 Pour créer les débris dont les eaux le pétrirent
Izby wody co w kamien przeistaczac mialy,
208 De générations quelles foules périrent !
Cale tlumy rodzajow przepadac musialy !
209 Combien de temps sur lui l’océan a coulé !
Jak dlugo on byc musial plokan Oceanem !
210 Que de temps dans leur sein les vagues l’ont roulé !
Jak dlugo on byl morskim tluczony balwanem !
211 En descendant des monts dans ses profonds abymes
Gdy z gor Oceanu lecial w bezdenne padoly
212 L’océan autrefois le laissa sur leurs cimes ;
Zostawil go gdzie owe wznosza sie wierzcholy
213 L’orage dans les mers de nouveau le porta ;
Poslednieysza w dno morskie zepchnela go burza,
214 De nouveau sur ses bords la mer le rejeta,
Druga pozniey na brzegi morskie go wynurza,
215 Le reprit, le rendit : ainsi, rongé par l’âge,
Raz wziety, raz rzucony, zawsze kolotany,
216 Il endura les vents, et les flots, et l’orage :
Twardniejac przetrwal burze, wiatry i balwany :
217 Enfin, de ces grands monts humble contemporain,
Tak marmur gor wynioslych towarzysz poziomy
218 Ce marbre fut un roc, ce roc n’est plus qu’un grain ;
Z blahej opoki przeszedl, wglaz slawie lakomy :
219 Mais, fils du temps, de l’air, de la terre, et de l’onde,
Tak przerobek powietrza, ognia, wody, ziemi,
220 L’histoire de ce grain est l’histoire du monde.
Dziennik naturze krysli ziarny scisnionemi.2.

  • Accès à la numérisation du texte : Polona.

Auteur de la page — Isabelle Koper 2019/05/12 19:29
Relecture — Morgane Tironi 2022/08/06 18:06


1 Franciszek Ksawery Chomiński, Człowiek wieyski albo Georgiki francuzkie, Vilnius, Drukarnia XX Missyonarzów, 1817.
2 Id., p. 72-73.