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Bonnel, Du langage de l'imagination. Nouveau traité de littérature

Antonin Bonnel est professeur de seconde au lycée de Lyon lorsqu'il publie son ouvrage didactique Du langage de l'imagination dans le but d'y fixer, comme il affirme dans son introduction, “les principes de l'art d'écrire”1. En renouant avec la tradition de l'enseignement littéraire du XVIIe siècle, Bonnel cherche à rattacher “l'étude à la Logique” 2. Ainsi, il propose un parcours progressif des grandes facultés qui concourent, selon lui, dans toute oeuvre littéraire, à savoir “la raison, la sensibilité et l'imagination” 3.

Le premier tome traite, comme l'indique son titre, du langage de l'imagination. Il est divisé en deux parties dont la première est consacrée à la présentation des différentes figures de style. Tout en soulignant la différence entre une définition scientifique d'objets matériels et leur description littéraire dans les arts d'imitation, Bonnel recourt à des citations diverses pour illustrer les différents tropes.

Il est important de souligner le caractère prescriptif de ce traité. En effet, les commentaires qui accompagnent les exemples visent avant tout à louer ou à blâmer les tournures choisies par un auteur.

La première citation du Chant III se trouve dans la première partie de l'ouvrage au Chapitre II “De la Représentation de la Nature” sous le §XXI “Analogies du bruit avec le mouvement. Qu'ils s'accompagnent le plus souvent l'un l'autre dans la nature, et que le langage ne les sépare pas.”:

Là s'élance en grondant la cascade écumante. 4

Vers concernés : chant 3, vers 335

La deuxième citation de l'Homme des champs intervient dans la deuxième partie de l'ouvrage qui traite “Du goût dans les oeuvres d'imitation” au chapitre III intitulé “De l'esprit et du sentiment dans les images, ou de l'expression, 1er degré de l'idéal” § V: “Du sentiment de la nature. Histoire de ce sentiment: Qu'il était gêné par le merveilleux mythologique. - Que Virgile a su pourtant l'en dégager. - Que les idées chrétiennes lui sont favorables. Mais dans quelle mesure? - Poétique de Chateaubriand.”:

Les amours de la Terre et d'Ether n'étaient point sans grandeur dans la Mythologie; chez un poète du XVIIIe siècle, les amours de la terre et du soleil sont presque ridicules. Cette même terre dans les deux vers qui suivent joue un personnage d'une mélancolie burlesque.

Et la terre sans fruits, sans fleurs et sans verdure,
Pleure en habits de deuil sa riante parure.

Ces puérilités sentimentales abaissent la grande image de l'hiver. Combien ne sont pas préférables à ces tours ingénieux, je ne dis pas les traits sentis de Lucrèce ou de Virgile, mais la simplicité expressive d'Horace: (…).5

Vers concernés : chant 3, vers 131-132

Cet extrait est instrumentalisé par Bonnel pour condamner Delille, ainsi que d'autres poètes de son “école idéaliste” parmi lesquels il cite Michaud, qui auraient réduit “toutes les facultés de l'âme à la sensation” 6 ce qui aurait rétréci l'horizon du poète au joli et au voluptueux.


Auteur de la page — Sarah Brämer 2017/04/10 11:54
Relecture — Morgane Tironi 2022/08/15 19:03


1 Antonin Bonnel, Du langage de l'imagination. Nouveau traité de littérature, Paris, Charles Delagrave et Cie et Lyon, Charles Palud, 1865, p. V.
2 Idem., p. VIII.
3 Idem., p. IX.
4 Idem., p. 102.
5 Idem., p. 241-242.
6 Idem., p. 242.