geoffroyhommedeschamps

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geoffroyhommedeschamps [2019/06/19 19:53] – [Citation 2] Hugues Marchalgeoffroyhommedeschamps [2023/03/13 19:18] (Version actuelle) – modification externe 127.0.0.1
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 ===== Présentation de l’œuvre ===== ===== Présentation de l’œuvre =====
  
-En 1800, [[geoffroy|Geoffroy]] et son collaborateur l'abbé Jean-Baptiste Grosier essaient de faire revivre [[anneelitteraire|L'Année littéraire]], célèbre périodique de la seconde moitié du XVIII/^e^/ siècle dont la parution avait été interrompue en 1790. En novembre, en tête du premier numéro du titre refondé, Geoffroy publie un compte-rendu d'une trentaine de pages sur //L'Homme des champs//[(Julien-Louis Geoffroy, « //L'Homme des Champs, ou les Géorgiques françaises, par// JACQUES DELILLE », //L'Année littéraire//, Paris, Sétier et Compagnie, t.I, n°1, 10\ brumaire an\ IX (1er novembre 1800), p.3-31.)]. Dans l'ensemble, **le journaliste se montre assez critique**. S'il reconnaît à l'oeuvre plusieurs mérites[(Particulièrement dans le premier chant, le plus réussi de l'oeuvre selon Geoffroy. Le critique trouve à Delille un talent particulier pour le portrait satirique et admet qu'il est un versificateur hors-pair.)], //L'Homme des champs// a trop de défauts pour enlever son approbation globale. La gloire de Delille repose selon lui beaucoup plus sur sa traduction des //Géorgiques// que sur ses œuvres originales[( Selon Geoffroy, le succès des //Jardins// doit beaucoup au triomphe des //Géorgiques//: « Ce sont ses copies qui ont donné de l'éclat à ses originaux: ses //Jardins// ont été redevables de leur première vogue, aux Géorgiques de Virgile » (//id.//, p. 4).)]. Pour Geoffroy, il s'agit d'un poème qui « ne nuira point à la réputation de l'auteur, déjà bien établie, mais [...] n'est pas fait pour l'augmenter[(//Id.//, p. 29)] ».     +En 1800, [[geoffroy|Geoffroy]] et son collaborateur l'abbé Jean-Baptiste Grosier essaient de faire revivre [[anneelitteraire|L'Année littéraire]], célèbre périodique de la seconde moitié du XVIII/^e^/ siècle dont la parution avait été interrompue en 1790. En novembre, en tête du premier numéro du titre refondé, Geoffroy publie un compte-rendu d'une trentaine de pages sur //L'Homme des champs//[(Julien-Louis Geoffroy, « //L'Homme des Champs, ou les Géorgiques françaises, par// JACQUES DELILLE », //L'Année littéraire//, Paris, Sétier et Compagnie, t.(nbsp)I, n°(nbsp)1, 10\ brumaire an\ IX (1er novembre 1800), p.(nbsp)3-31.)]. Dans l'ensemble, **le journaliste se montre assez critique**. S'il reconnaît à l'oeuvre plusieurs mérites[(Particulièrement dans le premier chant, le plus réussi de l'oeuvre selon Geoffroy. Le critique trouve à Delille un talent particulier pour le portrait satirique et admet qu'il est un versificateur hors-pair.)], //L'Homme des champs// a trop de défauts pour enlever son approbation globale. La gloire de Delille repose selon lui beaucoup plus sur sa traduction des //Géorgiques// que sur ses œuvres originales[( Selon Geoffroy, le succès des //Jardins// doit beaucoup au triomphe des //Géorgiques//: « Ce sont ses copies qui ont donné de l'éclat à ses originaux: ses //Jardins// ont été redevables de leur première vogue, aux Géorgiques de Virgile » (//id.//, p. 4).)]. Pour Geoffroy, il s'agit d'un poème qui « ne nuira point à la réputation de l'auteur, déjà bien établie, mais [...] n'est pas fait pour l'augmenter[(//Id.//, p. 29)] ».     
 ===== Principales critiques  ===== ===== Principales critiques  =====
  
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-\\ <tab> [...] d'après des essais assez multipliés, il paroît que le don de l'invention et le génie créateur lui manquent : il n'a pas ce coup d'oeil qui choisit un sujet, ordonne un plan, et forme un seul tout de diverses parties : heureux dans les détails, il rend avec une délicatesse admirable les ongles et les cheveux, mais il manque l'ensemble de la statue : +<tab> [...] d'après des essais assez multipliés, il paroît que le don de l'invention et le génie créateur lui manquent : il n'a pas ce coup d'oeil qui choisit un sujet, ordonne un plan, et forme un seul tout de diverses parties : heureux dans les détails, il rend avec une délicatesse admirable les ongles et les cheveux, mais il manque l'ensemble de la statue : 
  
-\\ ................ //Et ungues +................ //Et ungues 
 \\ Exprimet et molles imitabitur aere capillos,  \\ Exprimet et molles imitabitur aere capillos, 
 \\ Infelix operis summâ, quia ponere totum \\ Infelix operis summâ, quia ponere totum
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 Si depuis, ce succès ne s'est pas soutenu, c'est que l'auteur des Jardins n'étoit plus l'imitateur et l'émule du chantre des Géorgiques; il avoit plus perdu dans la société des grands et des riches qu'il n'avoit gagné dans le commerce de Virgile: son style et sa manière annonçoient le poète des petits soupers qui met dans ses vers la même coquetterie que les femmes dans leur parure; élégant, harmonieux, léger, d'une tournure charmante, mais petit et froid: au lieu de la noblesse de Raphaël, de la grâce simple et naïve du Corrège, on n'a trouvé que la recherche et l'affectation de Boucher[(//Id.//, p. 4-5)].  Si depuis, ce succès ne s'est pas soutenu, c'est que l'auteur des Jardins n'étoit plus l'imitateur et l'émule du chantre des Géorgiques; il avoit plus perdu dans la société des grands et des riches qu'il n'avoit gagné dans le commerce de Virgile: son style et sa manière annonçoient le poète des petits soupers qui met dans ses vers la même coquetterie que les femmes dans leur parure; élégant, harmonieux, léger, d'une tournure charmante, mais petit et froid: au lieu de la noblesse de Raphaël, de la grâce simple et naïve du Corrège, on n'a trouvé que la recherche et l'affectation de Boucher[(//Id.//, p. 4-5)]. 
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 L'auteur nous avertit naïvement, dès son début, que ce n'est point un poëme didactique qu'il va nous donner, mais une suite d'images de la nature, un amas de lieux communs, un poëme purement descriptif et sentimental, c'est-à-dire, un poëme vague, sans aucun but d'utilité, sans aucun fonds solide, et par conséquent un poëme ennuyeux. Quest-ce [sic] que l'art de jouir des champs? et puisque de son propre aveu cet art ne peut s'enseigner, pourquoi entasser dans quatre chants des morceaux agréables qui ne forment point un tout, et qui fatiguent par une lumière trop uniforme et trop vive? Il faut des ombres dans un tableau, et dans un poëme qui n'est pas soutenu par une action intéressante, il faut un fonds d'instruction et de préceptes[(//Id.//, p. 7)]. L'auteur nous avertit naïvement, dès son début, que ce n'est point un poëme didactique qu'il va nous donner, mais une suite d'images de la nature, un amas de lieux communs, un poëme purement descriptif et sentimental, c'est-à-dire, un poëme vague, sans aucun but d'utilité, sans aucun fonds solide, et par conséquent un poëme ennuyeux. Quest-ce [sic] que l'art de jouir des champs? et puisque de son propre aveu cet art ne peut s'enseigner, pourquoi entasser dans quatre chants des morceaux agréables qui ne forment point un tout, et qui fatiguent par une lumière trop uniforme et trop vive? Il faut des ombres dans un tableau, et dans un poëme qui n'est pas soutenu par une action intéressante, il faut un fonds d'instruction et de préceptes[(//Id.//, p. 7)].
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 Virgile avoit avec raison préféré aux jardins les moissons, les troupeaux, les vendanges, qui sont d'un intérêt bien plus général; mais lorsque sa Muse annonce quelque désir de célébrer les jardins, ce sont les fruits, les fleurs, les légumes; ce sont les plus humbles arbustes auxquels il destine ses chants: le potager, le verger du laboureur, voilà des objets qui le tentent; il n'eût point dans des vers orgueilleux, vanté les folies des Lucullus, les mers comblées, les montagnes applanies; le chantre de la simple nature eût cru déshonorer son génie en célébrant les outrages que lui faisoit le luxe dédaigneux du Xerxès romain. L'or prodigué pour l'amusement d'un Midas stupide, est plus fait pour exciter la haine et l'envie, que pour enflammer la verve d'un poète qui sent sa dignité : ainsi, lorsque Delille épuisoit les trésors de son imagination, pour parer des couleurs de la poésie ces parcs magnifique, ces jardins anglais où l'orgueil dominoit encore plus que le goût, il méconnoissoit son art, il avilissoit son talent, et ne laissoit voir en la place d'un favori d'Apollon, qu'un courtisan et un flatteur des heureux de son siècle (1)[(note de Geoffroy qui renvoie à son compte-rendu des //Jardins//)]. Virgile avoit avec raison préféré aux jardins les moissons, les troupeaux, les vendanges, qui sont d'un intérêt bien plus général; mais lorsque sa Muse annonce quelque désir de célébrer les jardins, ce sont les fruits, les fleurs, les légumes; ce sont les plus humbles arbustes auxquels il destine ses chants: le potager, le verger du laboureur, voilà des objets qui le tentent; il n'eût point dans des vers orgueilleux, vanté les folies des Lucullus, les mers comblées, les montagnes applanies; le chantre de la simple nature eût cru déshonorer son génie en célébrant les outrages que lui faisoit le luxe dédaigneux du Xerxès romain. L'or prodigué pour l'amusement d'un Midas stupide, est plus fait pour exciter la haine et l'envie, que pour enflammer la verve d'un poète qui sent sa dignité : ainsi, lorsque Delille épuisoit les trésors de son imagination, pour parer des couleurs de la poésie ces parcs magnifique, ces jardins anglais où l'orgueil dominoit encore plus que le goût, il méconnoissoit son art, il avilissoit son talent, et ne laissoit voir en la place d'un favori d'Apollon, qu'un courtisan et un flatteur des heureux de son siècle (1)[(note de Geoffroy qui renvoie à son compte-rendu des //Jardins//)].
 \\ Les Géorgiques françaises offrent le même vice dans le choix du sujet, la même confusion dans le dessin, et ces défauts ne sont pas toujours couverts par la même élégance et les mêmes grâces : Delille a dédaigné les travaux rustiques, les dons de Minerve et de Bacchus, les richesses de Cérès et de Pomone; les vrais trésors de la campagne lui paroissent ne convenir qu'à une Muse bourgeoise : ce ne sont point les occupations du laboureur qu'il a prétendu décrire, mais les amusements du riche; ce ne sont point les bienfaits de l'agriculture qu'il chante, mais ses miracles : des rochers qu'on enlève à coups de canon, des montagnes que l'on perce, voilà ses Géorgique : les présens dont la terre embellit sa surface, n'attirent point son attention ; il va fouiller dans ses entrailles, il compte les couches que son sein renferme, et nous offre en vers rocailleux un cours de minéralogie[(//Id.//, p. 5-7)].    \\ Les Géorgiques françaises offrent le même vice dans le choix du sujet, la même confusion dans le dessin, et ces défauts ne sont pas toujours couverts par la même élégance et les mêmes grâces : Delille a dédaigné les travaux rustiques, les dons de Minerve et de Bacchus, les richesses de Cérès et de Pomone; les vrais trésors de la campagne lui paroissent ne convenir qu'à une Muse bourgeoise : ce ne sont point les occupations du laboureur qu'il a prétendu décrire, mais les amusements du riche; ce ne sont point les bienfaits de l'agriculture qu'il chante, mais ses miracles : des rochers qu'on enlève à coups de canon, des montagnes que l'on perce, voilà ses Géorgique : les présens dont la terre embellit sa surface, n'attirent point son attention ; il va fouiller dans ses entrailles, il compte les couches que son sein renferme, et nous offre en vers rocailleux un cours de minéralogie[(//Id.//, p. 5-7)].   
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