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eschernymelanges [2023/03/10 14:20] – Espaces insécables : remplacer la syntaxe "\ :" qui ne fonctionne plus par "(nbsp)". Timothée Léchot | eschernymelanges [2023/03/13 19:18] (Version actuelle) – modification externe 127.0.0.1 |
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===== Présentation de l'œuvre ===== | ===== Présentation de l'œuvre ===== |
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En 1811, dans ses //Mélanges de littérature, d'histoire, de morale et de philosophie//, le Suisse [[escherny|Escherny]] dédie deux chapitres sévères[(François-Louis d'Escherny, //Mélanges de littérature, d'histoire, de morale et de philosophie//, Paris, Bossange et Masson, 1811, t. II, ch.\ 3, "De la poésie des modernes, et de la versification moderne…" et 4, "Continuation de la critique des vers français…".)] à la **versification française, qu'il juge inepte** et responsable de son peu de goût pour la poésie "moderne" produite dans cette langue, dont il estime au contraire fort les prosateurs. | En 1811, dans ses //Mélanges de littérature, d'histoire, de morale et de philosophie//, le Suisse [[escherny|Escherny]] dédie deux chapitres sévères[(François-Louis d'Escherny, //Mélanges de littérature, d'histoire, de morale et de philosophie//, Paris, Bossange et Masson, 1811, t. II, ch.(nbsp)3, "De la poésie des modernes, et de la versification moderne…" et 4, "Continuation de la critique des vers français…".)] à la **versification française, qu'il juge inepte** et responsable de son peu de goût pour la poésie "moderne" produite dans cette langue, dont il estime au contraire fort les prosateurs. |
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Lorsque je lis une belle page de prose, je me sens à mon aise, rien ne me gêne, ne m'embarrasse, ne me distrait du plaisir que je goûte\ ; je jouis. Lorsque je lis des vers, c'est précisément tout le contraire\ ; un certain vague dans les idées y tient l'ame indécise et la met à la gêne. C'est un travail, un état de contrainte\ ; je suis sur les épines, je ne sais jamais si j'ai saisi le sens\ ; une espèce de vapeur interposée l'obscurcit à mes yeux\ ; je le cherche, je relis, et le plus souvent il ne vaut pas la peine d'être cherché. | Lorsque je lis une belle page de prose, je me sens à mon aise, rien ne me gêne, ne m'embarrasse, ne me distrait du plaisir que je goûte(nbsp); je jouis. Lorsque je lis des vers, c'est précisément tout le contraire(nbsp); un certain vague dans les idées y tient l'ame indécise et la met à la gêne. C'est un travail, un état de contrainte(nbsp); je suis sur les épines, je ne sais jamais si j'ai saisi le sens(nbsp); une espèce de vapeur interposée l'obscurcit à mes yeux(nbsp); je le cherche, je relis, et le plus souvent il ne vaut pas la peine d'être cherché. |
\\ Ces rimes cousues par Morphée, au bout de chaque vers, me font bailler\ ; cette chûte périodique de sons qui reparoissent à intervalles égaux, me distrait du sens, et me cause la même inquiétude que l'eau qui s'échappe goutte à goutte d'une fontaine mal fermée. Ainsi, tous les vers faits depuis cent ans sont comme non-avenus pour moi, et pour tous ceux qui en reçoivent les mêmes impressions en tout ou en partie, et le nombre en est grand[(//Id//., p. 222-223.)]. | \\ Ces rimes cousues par Morphée, au bout de chaque vers, me font bailler(nbsp); cette chûte périodique de sons qui reparoissent à intervalles égaux, me distrait du sens, et me cause la même inquiétude que l'eau qui s'échappe goutte à goutte d'une fontaine mal fermée. Ainsi, tous les vers faits depuis cent ans sont comme non-avenus pour moi, et pour tous ceux qui en reçoivent les mêmes impressions en tout ou en partie, et le nombre en est grand[(//Id//., p. 222-223.)]. |
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Escherny prend soin de souligner que ces défauts sont **indépendants du génie des auteurs**. Il commente de manière négative des vers de Racine et Voltaire, puis il annonce(nbsp): "En veut-on encore des exemples\ ; cherchez-les, je ne dirai pas dans les mauvais, mais dans les meilleurs versificateurs Français, dans ceux qui sont regardés comme classiques, vous en trouverez à chaque page." Et c'est à ce titre qu'il choisit alors d'examiner la pratique de **Delille**, en ouvrant ses "Géorgiques françaises[(//Id//., p. 224.)]". | Escherny prend soin de souligner que ces défauts sont **indépendants du génie des auteurs**. Il commente de manière négative des vers de Racine et Voltaire, puis il annonce(nbsp): "En veut-on encore des exemples(nbsp); cherchez-les, je ne dirai pas dans les mauvais, mais dans les meilleurs versificateurs Français, dans ceux qui sont regardés comme classiques, vous en trouverez à chaque page." Et c'est à ce titre qu'il choisit alors d'examiner la pratique de **Delille**, en ouvrant ses "Géorgiques françaises[(//Id//., p. 224.)]". |
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===== Citations ===== | ===== Citations ===== |
Le terme propre est //multiplient//, au lieu de //doublent//, mais il a deux syllabes de trop. | Le terme propre est //multiplient//, au lieu de //doublent//, mais il a deux syllabes de trop. |
\\ De plus, les deux premiers vers sont oiseux, //riches// est pour la mesure, et //connoissances// pour rimer avec //jouissances//. | \\ De plus, les deux premiers vers sont oiseux, //riches// est pour la mesure, et //connoissances// pour rimer avec //jouissances//. |
\\ En prose élégante et nombreuse, on auroit dit avec plus de précision : //Cherchez autour de vous(nbsp): trois règnes à vos yeux étalent leurs richesses// et non leurs //secrets//. Mais 1.° il falloit rimer avec //sujets// ; 2.° le mot de riches venoit d'être employé, il ne pouvoit le répéter, il lui a substitué la cheville //secrets//\ ; 3.° les richesses des trois règnes appartiennent à la culture, et //leurs secrets// au physicien et au naturaliste, dont il n'est pas question ici ; 4.°enfin, on ne peut pas dire que les trois règnes ou leurs secrets sont les sujets de l'Homme des champs. Quelle langue barbare est obligé de parler un malheureux versificateur, pour obéir à des règles plus barbares encore[(//Id//., p. 227.)]\ ! | \\ En prose élégante et nombreuse, on auroit dit avec plus de précision : //Cherchez autour de vous(nbsp): trois règnes à vos yeux étalent leurs richesses// et non leurs //secrets//. Mais 1.° il falloit rimer avec //sujets// ; 2.° le mot de riches venoit d'être employé, il ne pouvoit le répéter, il lui a substitué la cheville //secrets//(nbsp); 3.° les richesses des trois règnes appartiennent à la culture, et //leurs secrets// au physicien et au naturaliste, dont il n'est pas question ici ; 4.°enfin, on ne peut pas dire que les trois règnes ou leurs secrets sont les sujets de l'Homme des champs. Quelle langue barbare est obligé de parler un malheureux versificateur, pour obéir à des règles plus barbares encore[(//Id//., p. 227.)](nbsp)! |
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La terre dans son sein, épouvantable gouffre, | La terre dans son sein, épouvantable gouffre, |
\\ Nourrit de noirs amas de bitume et de souffre\ ; | \\ Nourrit de noirs amas de bitume et de souffre(nbsp); |
\\ Enflamme l'air et l'onde, etc. | \\ Enflamme l'air et l'onde, etc. |
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Ces vers sont inintelligibles. Est-ce la terre qui enflamme l'air et l'onde\ ? Ne seroient-ce pas plutôt les noirs amas de bitume et de souffre\ ? | Ces vers sont inintelligibles. Est-ce la terre qui enflamme l'air et l'onde(nbsp)? Ne seroient-ce pas plutôt les noirs amas de bitume et de souffre(nbsp)? |
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Que l'horrible volcan inonda de ses feux. | Que l'horrible volcan inonda de ses feux. |