Voir la synthèse thématique sur les Usages lexicographiques.
Les 21 volumes de L'Improvisateur français forment un dictionnaire de lieux communs pour causeur, orateur ou écrivain en mal d'inspiration. Sous chaque terme, l'auteur, Sallentin (de l'Oise), compile une petite suite d'anecdotes ou d'extraits littéraires relatifs à la notion traitée.
La publication s'échelonna de 1804 à 1806.
Sallentin emprunte fréquemment à Delille. Systématiquement convoqués dans les tomes 2 à 20, Les Jardins viennent largement en tête ; ils sont suivis par L'Homme des champs, dont le chant 3 ne fait toutefois l'objet que d'un seul emprunt1, puis La Pitié, L'Imagination, les épîtres Sur l'utilité de la retraite et Sur le luxe (avec à chaque fois deux occurrences) et enfin la traduction des Géorgiques de Virgile (une citation). Dans quelques cas, l'attribution des extraits à Delille est fautive2.
Sallentin ne retient du chant 3 de L'Homme des champs que le passage sur le grain de sable :
GRAINE, GRAIN.
Mauvaise graine est tôt venue. (La Fontaine.)
Voyez d'un marbre usé le plus mince débris.
Quel riche monument ! de quelle grande histoire
Ses révolutions conservent la mémoire !
Composé des débris de l'empire animé,
Parla destruction ce marbre fut formé.
Pour créer ces débris dont les eaux le pétrirent,
De générations quelles foules périrent !
Combien de tems sur lui l'Ocean a coulé !
Que de tems dans leur sein les vagues l'ont roulé !
En descendant des monts dans les profonds abîmes,
L'Océan autrefois le laissa sur leurs cimes ;
L'orage dans les mers de nouveau le porta ;
De nouveau, sur ses bords la mer le rejetta,
Le reprit, le rendit. Ainsi rongé par l'âge,
Il endura les vents, et les flots et l'orage.
Enfin de ces grands monts humble contemporain,
Ce marbre fut un roc ; ce roc n'est plus grain ;
Mais fils du tems, de l'air, de la terre, de l'onde,
L'histoire de ce grain est l'histoire du monde. (Delille. )
Yézid II, Général des Ommiades, eut une fin qui mérite au moins de la pitié. Il s'amusait, un jour, à jeter des grains de raisin à son esclave chérie, nommée Habahah, qui les recevait dans sa bouche. Malheureusement un de ces grains, beaucoup plus gros en Syrie qu'en Europe, s'arrêta dans le gosier d'Habahah, et l'étouffa sur-lechamp. Yezid, au désespoir, ne voulut jamais permettre qu'on enterrât l'objet de son amour : il garda son corps huit jours entiers dans sa chambre, sans vouloir le quitter un instant. Enfin, obligé par la corruption, de consentir à s'en séparer, il mourut de sa douleur, après avoir ordonné qu'on l'inhumât dans le tombeau de sa chère Habahah. (Florian.)
Chez tous les peuples de l'antiquité, celui qui ne vendait pas son grain était réputé criminel, et la loi de Moïse condamnait à la mort quiconque recelait son grain dans ses greniers3. […]
Vers concernés : chant 3, vers 202-220.
Auteur de la page — Hugues Marchal 2017/02/10 22:10
Relecture — Morgane Tironi 2022/08/15 14:44