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Après avoir obtenu en 1844 le prix Montyon décerné par l'Académie française pour son plan d'éducation l'Enseignement régulier de la langue maternelle, c'est avec son Cours éducatif de langue maternelle que le père Girard procède à la réalisation de ce plan théorique. L'ouvrage est composé de trois parties, la syntaxe, la conjugaison et le vocabulaire et s'oppose ainsi aux manuels en usage à cette époque en Suisse pour l'apprentissage de la langue maternelle, souvent réduits à un simple lexique (par ex. Noël et Chapsal, Nouveau Dictionnaire de la langue française, 1826). Il s'agit en effet d'une véritable innovation dans le cadre de l'enseignement que de mettre ces différentes composantes “au service du développement de la pensée et de son expression par la langue”1.
Tandis que la première partie de l'ouvrage fournit, dans le vocabulaire annexé, des exemples simples afin de permettre à l'enfant de mémoriser l'enseignement grammatical, la troisième partie (tome II, Esquisses de compositions) sert à familiariser les élèves avec les règles de la versification, les locutions figurées (comme les métaphores, les allégories et les personnifications) et des éléments de mythologie à l'aide d'un choix de citations des poètes français. Cette structure progressive sert avant tout à “permettre le développement de la pensée et de l'expression de l'élève”2.
Le “Vocabulaire” de la troisième partie de l'ouvrage traite des “locutions impropres ou figurées”. C'est sous le seizième point, consacré aux “objets matériels personnifiés: les astres, la terre, les éléments, les phénomènes”, qu'on trouve une citation du chant 3 de l'Homme des champs illustrant la personnification de la terre. Le sujet est introduit par un bref commentaire astronomique3 ainsi que d'une précision de l'exercice à accomplir 4.
L'extrait de Delille n'est pas expliqué davantage, tout comme les citations de L. Racine, Lemierre, Saint-Lambert, De Bernis et J.-B. Rousseau qui l'accompagnent.
Et la terre sans fruits, sans fleur et sans verdure,
Pleure en habits de deuil sa riante parure. (Delille.)5
Girard mobilise également d'autres extraits de l'Homme des champs :
Heureux ou malheureux, l'homme a besoin d'autrui ,
Il ne vit qu'à demi, s'il ne vit que pour lui. (Delille.)6
. . . Lorsqu'aux lueurs du nocturne flambeau
L'heure de la veillée assemblait le hameau ,
Toujours de revenants quelque effrayante histoire,
Resserrait de frajeur le crédule auditoire. (Delille.)7
Le ciel devient-il sombre ? Eh bien ! dans ce salon,
Près d'un chêne brûlant j'insulte a l'aquilon. (Delille.)8
Voici les citations tirées des autres ouvrages de Delille:
1. La Pitié, Chant II
Le bonheur appartient à qui fait des heureux. (Delille.)9
2. Dithyrambe sur l'immortalité de l'âme
Que la terre est petite à qui la voit des cieux ! (Delille.)10
3. Les Géorgiques, Livre II
Heureux l'homme des champs, s'il connait son bonheur!
Fidèle à ses besoins, à ses travaux docile,
La terre lui fournit un aliment facile. (Delille.)11
4. ibid
Dites-moi quelle cause éclipse dans leur cours
Le clair flambeau des nuits, l'astre pompeux des jours ? (Le même.)12
5. Les Trois Règnes, Chant VII
Voyez au fond des eaux ces nombreux coquillages ;
La terre a moins do fruits, les bois moins de feuillages :
……………………………………………. (Le même.)13
6. ibid
Partout le grand Artiste a varié son plan. (Le même.)14
7. Les Géorgiques, Livre I
Le ciel descend en eau, et couche sur les plaines
Ces riantes moissons, vains fruits de tant de peines. (Delille.)15
8. La Pitié, Chant I
….. Cependant la chaumière
A repris du travail l'activité première;
Les roseaux avec art s'enlacent aux roseaux.
J'entends tourner la roue et rouler les fuseaux. (Delille.)16
9. ibid
Le malheur a sa honte et sa noble pudeur;
Seul et réfugié dans son asile sombre,
Aux regards indiscrets il se cache dans l'ombre :
Sachez donc le trouver dans son réduit affreux. (Delille.)17
10. La Pitié, Chant IV
Les ouragans, plus prompts que le tonnerre,
D'un immense débris couvrent au loin la terre.
Mais du monde tremblant ces horribles fléaux
Des révolutions n'égalent point les maux. (Le même.)18
11. Les Jardins, Chant II (modifié!)
Combien sous d'autres cieux de richesses sont prêtes !
Usurpez ces trésors. Ainsi le fier romain,
Conquit des fruits nouveaux, porta dans l'Italie
Le prunier de Damas, l'abricot d'Arménie. (Delille.)19
Vers concernés : chant 3, vers [X]-[X]