L'Antidote de l'athéisme, ou Examen critique du Dictionnaire des athées, anciens et modernes est publié anonymement, en 1800, par Léonard Aléa – qui en donnera en 1802 une version augmentée et cette fois signée de son nom, intitulée La Religion triomphante des attentats de l'impiété.
Comme l'indique le titre initial, l'auteur entend riposter à la parution alors toute récente d'un Dictionnaire des athées anciens et modernes. Cet ouvrage, qui défendait l'athéisme à un moment où cette position restait encore largement taboue, est dû à Sylvain Maréchal (1750-1803), assisté par Jérôme de Lalande (1732-1807).
Or Maréchal, poète et pamphlétaire, avait déjà exposé ses thèses dans un traité en vers inspiré du De natura rerum, Le Lucrèce français (1798). Quant à Lalande, cet astronome de renom avait assez fréquenté Delille avant que ce dernier ne quitte la France pour pouvoir inclure, dans l'édition de 1795 de son Astronomie des dames, une suite de vers à la gloire de Newton, composés par Delille mais alors encore inédits. En outre, Lalande accorda ses conseils à de nombreux poètes souhaitant traiter d'astronomie en vers, notamment Dominique Ricard, auteur d'un ouvrage sur La Sphère.
Qu'Aléa ait connu ou non ces éléments, qui unissent le Dictionnaire des athées à des cercles liés à la poésie scientifique, il puise dans le chant 3 de L'Homme des champs, qu'une partie de la presse saluait comme l'une des meilleures mises en pratique du genre, des arguments contre Maréchal et Lalande.
Aléa cite le début du chant 3, en note, quand il accuse les athées de chercher à profiter de l'ignorance de leurs victimes.
… Dans sa triste ignorance
Le vulgaire voit tout avec indifférence :
Des desseins du grand Être atteignant la hauteur,
Il ne sait point monter de l’ouvrage à l’auteur.
Géorgiques françaises, IIIe chant1
Vers concernés : chant 3, vers 3-6.
L'Homme des champs apparaît encore en note, à l'appui d'un passage accusant une “philosophie destructrice et meurtrière” d'avoir nourri la violence antireligieuse de la Révolution et de continuer à corrompre la société en 1800.
Ici pourrait s'appliquer ce vers de M. l'abbé de Lille.
O France, ô ma patrie ! ô séjour de douleurs !
Géorgiques françaises, IIIe chant2
Vers concerné : chant 3, vers 377.