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vidalexamenimpartial [2023/03/10 14:20] – Espaces insécables : remplacer la syntaxe "\ :" qui ne fonctionne plus par "(nbsp)". Timothée Léchotvidalexamenimpartial [2023/03/10 14:25] – Espaces insécables : pour les pages Timothée Léchot
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 ===== Présentation de l'œuvre ===== ===== Présentation de l'œuvre =====
  
-L'"Examen impartial de L'Homme des champs ou les Géorgiques françaises de Jacques Delille, & des principales critiques qui en ont été faites" paraît en deux livraisons, en avril et mai 1801, dans l'[[espritdesjournauxfr|Esprit des journaux français et étrangers]]. Ce compte rendu, signé par [[vidal|P. Vidal]], est un **article original**, bien que le périodique bruxellois qui l'accueille soit spécialisé dans la compilation des textes de presse. Il y tranche en outre par sa longueur, puisqu'il se déploie sur près de **soixante-dix pages**[(Vidal, "Examen impartial de L'Homme des champs ou les Géorgiques françaises de Jacques Delille, & des principales critiques qui en ont été faites", //Esprit des journaux français et étrangers//, germinal an IX (avril 1801), p.73-122 et floréal an IX (mai 1801), p.73-110.)]. C'est que Vidal ne se contente pas d'émettre un avis sur le poème de Delille\ ; il entend proposer une **synthèse d'envergure sur le texte et sa réception**.+L'"Examen impartial de L'Homme des champs ou les Géorgiques françaises de Jacques Delille, & des principales critiques qui en ont été faites" paraît en deux livraisons, en avril et mai 1801, dans l'[[espritdesjournauxfr|Esprit des journaux français et étrangers]]. Ce compte rendu, signé par [[vidal|P. Vidal]], est un **article original**, bien que le périodique bruxellois qui l'accueille soit spécialisé dans la compilation des textes de presse. Il y tranche en outre par sa longueur, puisqu'il se déploie sur près de **soixante-dix pages**[(Vidal, "Examen impartial de L'Homme des champs ou les Géorgiques françaises de Jacques Delille, & des principales critiques qui en ont été faites", //Esprit des journaux français et étrangers//, germinal an IX (avril 1801), p.(nbsp)73-122 et floréal an IX (mai 1801), p.(nbsp)73-110.)]. C'est que Vidal ne se contente pas d'émettre un avis sur le poème de Delille\ ; il entend proposer une **synthèse d'envergure sur le texte et sa réception**.
  
 ===== Une position surplombante ===== ===== Une position surplombante =====
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 ===== Troisième question : l'exécution ===== ===== Troisième question : l'exécution =====
  
-Dans cette section, publiée en mai 1801, Vidal commence par discuter les "vices de détails" et "négligences de style", tout en précisant que "les beautés de ce genre sont trop nombreuses pour pouvoir les citer toutes[(//Id//., mai 1801, p.73.)]" et qu'on ne doit pas lire un grand poète une grammaire à la main… Cette distinction le conduit à procéder en deux temps.+Dans cette section, publiée en mai 1801, Vidal commence par discuter les "vices de détails" et "négligences de style", tout en précisant que "les beautés de ce genre sont trop nombreuses pour pouvoir les citer toutes[(//Id//., mai 1801, p.(nbsp)73.)]" et qu'on ne doit pas lire un grand poète une grammaire à la main… Cette distinction le conduit à procéder en deux temps.
  
 ==== Les faiblesses ==== ==== Les faiblesses ====
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 ===== Quatrième question : effet de l'ouvrage  ===== ===== Quatrième question : effet de l'ouvrage  =====
  
-Dans une ultime section, à valeur de bilan, Vidal se penche sur "//l'effet que produit cet ouvrage [et sur] les corrections qu'on a proposées à l'auteur//[(//Id//., p.108.)]". Le critique insiste alors simultanément sur la profonde beauté du texte et son désordre, pour offrir **une image tentant de conjuguer ces deux jugements en tension**.+Dans une ultime section, à valeur de bilan, Vidal se penche sur "//l'effet que produit cet ouvrage [et sur] les corrections qu'on a proposées à l'auteur//[(//Id//., p.(nbsp)108.)]". Le critique insiste alors simultanément sur la profonde beauté du texte et son désordre, pour offrir **une image tentant de conjuguer ces deux jugements en tension**.
  
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 Je pourrois résoudre la première de ces questions [//celle sur l'effet//] par un seul mot, l'admiration. Cependant on me permettra d'avancer ici quelques considérations qui naissent de l'ensemble de mon examen. Je pourrois résoudre la première de ces questions [//celle sur l'effet//] par un seul mot, l'admiration. Cependant on me permettra d'avancer ici quelques considérations qui naissent de l'ensemble de mon examen.
 \\ Le poëme de l'Homme des champs inspire sans doute de l'admiration au lecteur qui est assez éclairé pour en sentir tout le mérite. Mais ce sentiment est-il l'unique effet que doive produire un ouvrage\ ? Et un auteur ne doit-il pas offrir à notre ame quelque chose qui l'attache & qui l'intéresse davantage\ ? Un peintre peul facilement promener notre admiration sur une riche collection de diffèrent tableaux. Mais quelle impression nous en reste-t-il lorsque nous sommes sortis de son cabinet\ ? Nous nous disons que ce qu'il nous a montré est magnifique, &p eu après, le souvenir même s'en efface. Un poëme, dont toutes les parties sont achevées en elles- mêmes, pourroit donc produire de l'admiration, sans avoir le mérite d'un bel ensemble. Il y aucoît sans doute du rigorisme à vouloir faire une entière application de cet exemple aux Géorgiques françaises(nbsp): cependant ce ne seroit pas tout à fait sans fondement. On me répondra, & avec raison, que Delille ne se borne pas à nous faire admirer l'art de chacun de ses tableaux, & que son objet principal est de nous enseigner à jouir de tout ce qui est relatif à la campagne. Or, ajoutera-t-on, que l'on mette ce poëme dans les mains d'un homme doué d'une grande fortune & d'un esprit cultivé, & il est certain qu'il en sera son livre favori. Je n'en doute point, mais dans cet examen il s'agit plus de la forme que du sujet de cet ouvrage. I1 suffira donc, pour répondre à la question que je me suis proposée, de combiner les observations que nous venons de faire, & on conviendra que ce poëme nous inspire une admiration qui est quelquefois mêlée d'étonnement. Il est semblable à un édifice dont la construction est fort irrégulière, mais qui, dans l'intérieur, offre des salons somptueux & richement décorés. On admire chacune de ses parties séparément, mais on s'étonne que d'un vestibule resserré, difficile, & qui semble conduire à une chambre rustique, on entre dans des appartemens magnifiques, & mal disposés entr'eux. On peut donc conclure que si Delille établissoit de l'ordre dans son poëme l'étonnement que nous éprouvons en le parcourant s'évanouiroit, & que notre admiration, toujours soutenue, se porteroit autant sur la perfection du plan que sur celle des détails. \\ Le poëme de l'Homme des champs inspire sans doute de l'admiration au lecteur qui est assez éclairé pour en sentir tout le mérite. Mais ce sentiment est-il l'unique effet que doive produire un ouvrage\ ? Et un auteur ne doit-il pas offrir à notre ame quelque chose qui l'attache & qui l'intéresse davantage\ ? Un peintre peul facilement promener notre admiration sur une riche collection de diffèrent tableaux. Mais quelle impression nous en reste-t-il lorsque nous sommes sortis de son cabinet\ ? Nous nous disons que ce qu'il nous a montré est magnifique, &p eu après, le souvenir même s'en efface. Un poëme, dont toutes les parties sont achevées en elles- mêmes, pourroit donc produire de l'admiration, sans avoir le mérite d'un bel ensemble. Il y aucoît sans doute du rigorisme à vouloir faire une entière application de cet exemple aux Géorgiques françaises(nbsp): cependant ce ne seroit pas tout à fait sans fondement. On me répondra, & avec raison, que Delille ne se borne pas à nous faire admirer l'art de chacun de ses tableaux, & que son objet principal est de nous enseigner à jouir de tout ce qui est relatif à la campagne. Or, ajoutera-t-on, que l'on mette ce poëme dans les mains d'un homme doué d'une grande fortune & d'un esprit cultivé, & il est certain qu'il en sera son livre favori. Je n'en doute point, mais dans cet examen il s'agit plus de la forme que du sujet de cet ouvrage. I1 suffira donc, pour répondre à la question que je me suis proposée, de combiner les observations que nous venons de faire, & on conviendra que ce poëme nous inspire une admiration qui est quelquefois mêlée d'étonnement. Il est semblable à un édifice dont la construction est fort irrégulière, mais qui, dans l'intérieur, offre des salons somptueux & richement décorés. On admire chacune de ses parties séparément, mais on s'étonne que d'un vestibule resserré, difficile, & qui semble conduire à une chambre rustique, on entre dans des appartemens magnifiques, & mal disposés entr'eux. On peut donc conclure que si Delille établissoit de l'ordre dans son poëme l'étonnement que nous éprouvons en le parcourant s'évanouiroit, & que notre admiration, toujours soutenue, se porteroit autant sur la perfection du plan que sur celle des détails.
-Cette remarque est la plus importante qu'on puisse faire sur cet ouvrage, & j'ai cru pouvoir y revenir plusieurs fois, parce qu'elle n'est pas conforme à l'opinion de tout le monde. Ainsi je fais, à l'égard d'une opinion qui me semble erronée, ce que Condillac faisoit à l'égard des préjugés. Quand on combat un préjugé, disoit- il, il faut l'attaquer à plusieurs reprises[(//Id//., p.108-110.)].+Cette remarque est la plus importante qu'on puisse faire sur cet ouvrage, & j'ai cru pouvoir y revenir plusieurs fois, parce qu'elle n'est pas conforme à l'opinion de tout le monde. Ainsi je fais, à l'égard d'une opinion qui me semble erronée, ce que Condillac faisoit à l'égard des préjugés. Quand on combat un préjugé, disoit- il, il faut l'attaquer à plusieurs reprises[(//Id//., p.(nbsp)108-110.)].
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-Ce plan [//alternatif//] est fort simple à la vérité, & c'est pour cela qu'il est bon. Mais le génie ne peut-il pas inventer quelque chose de fort bon, qui pourtant s'élève au-dessus du simple\ ? Lorsque Thomas a composé son éloge de Marc-Aurèle, un plan simple auroit-il valu la marche neuve & dramatique qu'il a donnée à son discours\ ? Je ne le croirai jamais. Or, Delille peut prendre un essor semblable, & arriver à son but par des routes qu'il se sera frayées lui-même. Telle est ma conclusion[(//Id//., p.110-111.)].+Ce plan [//alternatif//] est fort simple à la vérité, & c'est pour cela qu'il est bon. Mais le génie ne peut-il pas inventer quelque chose de fort bon, qui pourtant s'élève au-dessus du simple\ ? Lorsque Thomas a composé son éloge de Marc-Aurèle, un plan simple auroit-il valu la marche neuve & dramatique qu'il a donnée à son discours\ ? Je ne le croirai jamais. Or, Delille peut prendre un essor semblable, & arriver à son but par des routes qu'il se sera frayées lui-même. Telle est ma conclusion[(//Id//., p.(nbsp)110-111.)].
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 ===== Un appel final  ===== ===== Un appel final  =====
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-Enfin je ne dirai plus qu'un mot\ ; il est l'expression de mes vœux & dé ceux de tous les amis de la littérature en France. Delille est encore éloigné de son pays natal, & cet éloignement est peut-être, comme on l'a souvent bien observé, la cause des défauts de ses Géorgiques. Il est donc important qu'il y rentre, avant même de retoucher son poëme. Ah\ ! puisse-t-il enfin céder à une invitation si souvent réitérée, & qui intéresse autant sa propre gloire que celle de sa patrie[(//Id//., p.111.)].+Enfin je ne dirai plus qu'un mot\ ; il est l'expression de mes vœux & dé ceux de tous les amis de la littérature en France. Delille est encore éloigné de son pays natal, & cet éloignement est peut-être, comme on l'a souvent bien observé, la cause des défauts de ses Géorgiques. Il est donc important qu'il y rentre, avant même de retoucher son poëme. Ah\ ! puisse-t-il enfin céder à une invitation si souvent réitérée, & qui intéresse autant sa propre gloire que celle de sa patrie[(//Id//., p.(nbsp)111.)].
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